Metz : le quartier impérial (voyage en Lorraine - octobre 2020)
Metz
Le quartier impérial
Il y a eu plusieurs villes de Metz au cours de l’histoire : une importante cité-gallo-romaine (Divodurum), une ville médiévale et moderne, corsetée par ses remparts, puis une ville ouverte avec la création de l’extension allemande, au début du XXe siècle. Longtemps ville d’Empire, intégrée au monde germanique, Metz devient française en 1552, avec les autres évêchés, Toul et Verdun, prélude à la conquête de la Lorraine par la France.
Metz, ville allemande
Avec le Traité de Francfort (10 mai 1871) qui permet à l’Allemagne d’annexer la Moselle, conséquence de la guerre de1870-1871 perdue par la France, Metz redevient une ville allemande. Le trophée est beau pour le nouvel Empire allemand. Metz devient alors le chef-lieu de la Lorraine allemande, intégrée dans la Terre d’Empire Alsace-Lorraine (Reichsland Elsass-Lothringen). Devenue une ville-frontière, elle renforce sa vocation militaire. De nouveaux forts sont construits, constituant une « barrière de fer » et une garnison de 25 000 hommes est présente.
Metz devient aussi progressivement une ville d’immigration allemande. En 1870, elle compte 50 000 habitants. Ne pouvant accepter l’annexion allemande, un tiers des Messins part, option prévue par le traité de Francfort, qui permet à l’Allemagne de se débarrasser des irréductibles. Ces optants vont s’installer en Lorraine française (Nancy) ou dans d’autres provinces françaises. D’abord faible dans les années 1870, l’immigration allemande s’intensifie dans les années 1890, compensant le départ des optants. Les immigrés allemands, appelés Altdeutschen (Vieux Allemands) par rapport aux Lorrains (et Alsaciens) qui sont les nouveaux Allemands, deviennent finalement majoritaires dans la population. En 1895, ils sont 35 380 et les « autochtones » 21 300.
Cette évolution démographique a des conséquences sur les municipalités. À partir de 1886, les élections municipales donnent la majorité aux Altdeutschen et des maires allemands se succèdent, permettant de développer de nouveaux axes de germanisation.
La germanisation urbaine
Rien de tel qu’un changement de décor pour brouiller les repères culturels nationaux.
Afin de consolider l’empreinte allemande, l’empereur Guillaume II, au pouvoir depuis 1888, décide de créer une extension au Sud de la ville, entre Moselle et Seille, dans un terrain quasiment nu constituant un no man’s land militaire. Ce terrain de 76 ha est acheté à l’armée. Sa réalisation est confiée à l’architecte urbaniste de la ville, Conrad Wahn (conseiller municipal Altdeutsch), qui s’inscrit dans la dynamique des courants d’urbanisme outre-Rhin et s’inspire des études de Baumeister, Stübben et Sitte, ainsi que des concepts anglo-saxons sur les cités-jardins. Metz devient ainsi un laboratoire d’urbanisme. L’objectif est de créer une nouvelle ville germanique, appelée Neustadt (la Nouvelle Ville) et actuellement le quartier impérial, avec l’injonction de produire de la diversité dans l’unité et d’offrir aux habitants un quartier-modèle.
Une planification rigoureuse est élaborée (finalisation en 1903). Le plan d’extension soumis à enquête publique est accompagné d’un « règlement sur les constructions », encore inexistant en France. Le règlement prévoit de construire des immeubles de rapport et des villas, des bâtiments publics et d’offrir des services aux habitants. C’est un projet pharaonique qui doit doubler la surface habitable de la ville. L’immense terrain est loti en 46 lots de formes irrégulières, qui génèrent des constructions d’angle atypiques et des rues courbes.
Les travaux commencent par la destruction de la muraille dont il subsiste la tour Camoufle (01). Les matériaux de la muraille servent à combler les fossés et à créer un Ring : le Kaiser-Wilhelm Ring, l’actuelle avenue Foch, élément typiquement germanique pour gérer les flux.
Itinéraire dans la Nouvelle Ville
Le Ring
Le Ring est l’avenue de prestige, la vitrine de l’architecture bourgeoise historiciste, éclectique et moderne. Les architectes viennent de toute l’Europe. Les propriétaires sont des Messins autochtones ou Altdeutschen.
Les villas sont construites au nord du Ring. Quatre îlots sont lotis à cet effet. Ce sont des villas urbaines, agrémentées de jardinets. Le droit pour les propriétaires de construire sans contrainte de style, génère une mosaïque architecturale à laquelle concourt l’engouement pour l’historicisme et l’éclectisme.
Historicisme : Courant architectural du XIXe s. jusqu’à l’entre-deux-guerres qui remet au goût du jour des styles anciens. Exemples les styles néoroman, néogothique, néo-Renaissance, néobaroque, néoclassique.
Éclectisme : Courant architectural entre 1860 et la fin des années 1920, caractérisé par des emprunts à différents styles ou époques de l’histoire de l’art et de l’architecture.
Jugendstil : Version Art nouveau en Allemagne, issue de la Sécession munichoise ou de Darmstadt.
Parmi les villas du Ring :
La villa Bleyler, villa d’angle au n°14, de style éclectique et Jugendstil, avec un portail Art nouveau
La villa Wildenberger, au n° 16, Jugendstil munichois (02-03).
La villa Wahn, au n°18, villa de l’architecte urbaniste. Style néo-Renaissance (04).
La villa Linden, au n°20, style néo-Renaissance. Oriel d’angle. Quatre visages sculptés en façade.
La villa Burger, dite Salomon, au n°22. Extravagante villa datant de 1904, construite par l’architecte Eduard Hermann Heppe, de style pseudo régionaliste, à pan de bois évoquant l’Alsace, avec une tourelle à arêtières vernissées, une entrée néo-Renaissance, un vitrail floral Art nouveau (05).
La végétalisation du terre-plein central du Ring, les jardinets des villas, les parcelles arborées renvoie à l’esprit cité-jardin (06).
De l’autre côté du Ring, côté sud, on peut admirer l’enfilade des immeubles (07). La variété des matériaux individualise les constructions : on trouve du grès rose, de la pierre de Jaumont (jaune), du calcaire (08-09). La diversité des styles, avec une prédilection pour l’éclectisme qui inclut quelques touches françaises, est aussi de rigueur. Dans le décorum, des oriels par goût du médiéval (10). Des décors sculptés inventifs créent de la fantaisie.
Oriel : Avant-corps garni de baies, en saillie sur la façade.
Parmi les immeubles du Ring :
N°27 Sculpture d’un petit moine buveur de bière, symbole de la ville de Munich.
N°25 Immeuble de style Louis XV, avec dôme d’angle, surabondance de coquilles et riches ferronneries aux balcons.
N°23 Hôtel Royal. Les architectes Billing (chef de l’École de Karlsruhe) et Vittali (à son actif, des immeubles sur la Riviera italienne) ont tiré un bon parti de la parcelle d’angle polygonale (11).
N° 19 Immeuble à fronton baroque et partie basse Jugendstil.
La place Raymond-Mondon et la rue Gambetta
On y remarque :
L’ancienne Reichsbank (1907) en grès rose, actuellement Chambre de commerce et d’industrie, avec une élégante façade néoclassique, couronnée de pots à feu en fonte (12).
Le monumental hôtel des Arts et Métiers, ancien hôtel des Corporations (1906-1909), résultat d’un concours d’architecture remporté par Gustav Oberthur, un Alsacien, construit en grès des Vosges, sur une parcelle d’angle polygonale, reposant sur une base de pieux de béton. Il affiche le style de la Renaissance alsacienne avec un pignon à volutes et une toiture complexe (13). Sur les balustrades du balcon qui circonscrit l’angle et sur les consoles qui le soutiennent une série de grotesques et de personnages se rapportant à la mythologie rhénane : Wassermann (ondins), Lorelei dépoitraillées (14).
L’immeuble se prolonge rue Gambetta. Son nom est encore gravé en allemand (15).
Le restaurant des Corporations occupe le rez-de-chaussée de l’immeuble. À l’étage, la salle des fêtes devenue une salle de cinéma a conservé ses vitraux dans les grandes baies circulaires.
En face, au n°3 de la rue Gambetta, le palais de cristal (1910), ancien centre festif et balnéaire, doit son nom au fait que sa façade de béton armé était couverte de plaques de cristal de Bohême et de mosaïques, d’inspiration Sécession viennoise. De même, la luxueuse piscine au deuxième étage, décorée comme un palais viennois (17). Conçu pour offrir aux Messins des possibilités de délassements modernes et hédonistes, l’ensemble trop avant-gardiste eut une existence éphémère.
Parce qu’elle relie la place Raymond-Mondon à la gare, la rue Gambetta est une rue importante. Elle est donc dotée d’immeubles à la décoration soignée.
N°20, immeuble en pierre de Jaumont, avec des représentations des signes du zodiaque.
N°8, immeuble de style Art déco en pierre blanche. Les quatre saisons en bas-relief évoquent les Grâces antiques (16).
Cette rue offre une belle perspective sur la gare.
Le quartier de la gare
La Nouvelle Ville est aussi une vitrine impériale. C’est pourquoi Guillaume II la dote d’édifices publics monumentaux, d’aspect très germanique : la nouvelle gare, les postes. La gare est l’élément structurant de la Nouvelle Ville.
La nouvelle gare :
Il existait déjà une gare, dans le glacis de la citadelle, reconstruite en 1878.
Mais pour Guillaume II, la construction d’une nouvelle gare est une nécessité stratégique pour acheminer rapidement un grand nombre de soldats en prévision d’une guerre sur deux fronts. En 1901, il déclare d’utilité publique la construction d’une nouvelle gare et d’une nouvelle ligne ferroviaire. Elle est l’œuvre de Jürgen Kröger, un Berlinois, lauréat du concours d’architecture. Les travaux durent de 1903 à 1908.
La modernité
Cette gare est à la fois une gare de voyageurs et de marchandises.
Les quais sont particulièrement ingénieux. Chaque ligne est desservie par deux quais. D’un côté, on aménage des quais hauts à hauteur des wagons pour faciliter l’embarquement et le débarquement du matériel militaire, de l’autre, des quais bas à hauteur des marchepieds des wagons pour les voyageurs. Les différents niveaux de la gare, aux voies surélevées, sont desservis par des ascenseurs hydrauliques. Par ailleurs, toutes les nouvelles techniques de l’époque sont utilisées : électricité, chauffage central, ventilation et béton armé. 3000 pieux en béton sont enfoncés dans le sous-sol meuble pour le consolider.
La monumentalité
La gare est un immense édifice de 300 m de longueur, construite en grès mosellan gris pâle, avec un soubassement de basalte noir. Les dissymétries et les décrochements permettent de distinguer les différentes parties de la gare (18). Dans cet ensemble, on remarque les pavillons en saillie, l’entrée des voyageurs flanqué d’une massive tour d’horloge et le pavillon impérial doté d’un balcon ostentatoire en pierre (19).
Un style typiquement germanique
L’architecte Kröger propose un édifice Jugendstil, mais Guillaume II impose le style néoroman rhénan, ou Rundbogenstil, s’inspirant des cathédrales rhénanes et évoquant le Saint Empire romain germanique. Kröger remanie donc son projet. Il donne au pavillon d’entrée l’allure d’un transept d’église et à la tour de l’Horloge ressemblant à un clocher un toit rhomboïdal, inspiré des édifices religieux rhénans (cathédrale de Spire) (20). Le pavillon impérial est très représentatif du Rundbogenstil (21).
Rundbogenstil : « style de l’arc en plein cintre », employé dans les édifices publics à partir de 1830.
La Somptuosité des espaces intérieurs
Le hall des départs est doté d’une immense voûte en berceau décorée de motifs floraux et de rubans en stuc. Il porte le nom de Jean Moulin dont le décès aurait été constaté en gare de Metz, au cours de son transfert vers l’Allemagne. Sur une traverse en hauteur, une statue en bronze de Jean Moulin accompagné de trois personnes figurant « l’armée des ombres ».
Une voûte vitrée d’une haute technicité couvre la galerie reliant halls d’arrivée et de départ.
Avec le hall des départs, le buffet est inscrit aux Monuments Historiques (22). Il a été célébré par Bernard Lavilliers, « Le buffet de la gare de Metz » (album Le Stéphanois), 1975.
Pour entrer dans le pavillon impérial, il faut franchir une porte gardée par des lions en basalte, inspirés d’empires antiques (23). Il comprend un vestibule avec une décoration byzantine somptueuse. Dans la salle de réception, un grand vitrail de Charlemagne, en empereur à la barbe fleurie mais avec les yeux de Guillaume II (24), renvoie au passé carolingien de Metz par saint Arnould, son évêque…C’est une manière de rappeler aux Lorrains qu’ils ont un passé médiéval commun avec les Allemands.
Le décor sculpté : des œuvres de propagande
Nombreuses sont les sculptures qui glorifient le passé germanique et l’Empire allemand.
À l’extérieur du pavillon impérial, plusieurs scènes exaltent les combats des guerriers germaniques. On voit le héros Hermann repousser les Romains (25) vers le Rhin (bataille du Teutoburger Wald) et la défaite des Huns au Ve s. La représentation du Graoully (26) permet d’évoquer les croyances médiévales. À la base de la tour de l’Horloge, se dresse une grande statue de Roland (27), le neveu légendaire de Charlemagne, sujet courant en Allemagne du Nord. Selon les aléas de l’histoire de Metz, la statue a été décapitée trois fois depuis sa création (1908) et sa tête remplacée selon le contexte par celle d’un Gaulois ou celle de Haeseler (feld-maréchal allemand, surnommé « le diable de Metz » pour son rôle en Lorraine pendant la guerre de 1870).
Un tympan sculpté du pavillon impérial montre un chevalier dont l’épée est dégainée qui regarde une femme travaillant au rouet (28). La signification est contenue dans le discours d’inauguration de Guillaume II : « les œuvres de paix s’épanouissent sous la protection des armes ».
Sur les rampants du pignon du pavillon d’entrée, les bustes d’une Alsacienne et d’une Lorraine avec leur coiffe traditionnelle veulent cautionner le nouveau statut des provinces conquises.
Et aussi à l’origine, une profusion de sculptures de couronnes impériales, d’aigles germaniques.
Le modernisme et les voyages sont aussi mis à l’honneur.
Au sommet du pignon du pavillon d’entrée, les allégories de la mine et de la sidérurgie glorifient la Lorraine.
Sous la marquise de l’entrée, une tête de monstre formée par les essieux des bogies et un cheval-vapeur qui crache de la vapeur par les naseaux (29) montrent les progrès techniques des transports. En bas de la tour, parmi les divers moyens de locomotion de l’époque, on trouve le zeppelin.
De nombreuses scènes de voyageurs sont représentées S’agit-il de montrer que la gare est empruntée par des gens de toute condition sociale et contribue à la cohésion sociale ? Une foule de gens du peuple se préparant au départ sont représentés dans les frises de la voûte de l’entrée. Des bourgeois aussi, reconnaissables aux chapeaux haut-de-forme et aux cols durs (30). Divers cheminots dans l’exercice de leurs fonctions témoignent de l’organisation efficace du chemin de fer allemand (31).
Les entrées des salles d’attente des 1re (32) et 3e (33) classes sont clairement indiquées par des représentations réalistes des classes sociales concernées.
Par ses références germaniques, la gare rattache Metz à l’Allemagne wilhelmienne et carolingienne. Elle montre aussi la puissance de l’Empire allemand.
Le château d’eau (1908)
À proximité de la gare, il se présente comme un donjon surmonté d’un hourd (34).
Il procurait l’eau nécessaire aux locomotives à vapeur. Il comprenait aussi des bains-douches pour les cheminots.
La poste de la gare (1903-1906)
Grande bâtisse en pierre de Jaumont, elle a une structure de palais néoclassique avec un corps principal et des ailes en retour d’équerre. Elle est de style néoroman car l’architecte Ludwig Bettcher suit scrupuleusement les desiderata de l’empereur.
La poste centrale (1901-1911)
Elle a l’allure d’un imposant château fort en grès rouge (35). Elle est achevée par Ludwig Bettcher. Elle est ponctuée de tours de différentes formes. La tour d’angle rappelle celle du château de Marienbourg appartenant aux chevaliers teutoniques.
L’empereur impose son goût pour le décorum. À l’intérieur, le vestibule est digne d’un palais avec sa double rangée de colonnes en granit poli, à chapiteaux historiés.
Au sud-ouest
L’ancienne gare (1878), place du Roi-Georges, construite par l’architecte Jacobsthal (un Berlinois), en pierre de Jaumont, dans le Rundbogenstil, pour remplacer la précédente ravagée par un incendie. Elle a l’allure d’un palais, avec l’ordonnancement de sa longue façade, des pavillons latéraux ressemblant à des arcs de triomphe, son décor inspiré de la Renaissance italienne (36). Elle a été désaffectée en 1908, remplacée par la nouvelle gare.
La caserne Barbot, avenue de Lattre de Tassigny, ancienne caserne bavaroise fait partie d’un grand ensemble de casernes, en briques rouges, comme les édifices en Allemagne du Nord. Le collège Barbot occupe maintenant les lieux.
Le lycée Georges-de-la-Tour, place Maud’huy, construit par Conrad Wahn en 1910, comme école supérieure de jeunes filles, en style néobaroque.
Au Nord de l’avenue Foch en dehors du périmètre de la Nouvelle Ville
Le palais du Gouverneur, rue de la citadelle, en haut d’une colline, dans un espace paysager. C’est l’ancienne résidence de fonction du commandant du 16e corps d’armée, construit en 1902-1904, en pierre de Jaumont, dans un style éclectique qui fait une place à la fantaisie, surprenante dans un édifice militaire (37). C’est actuellement la résidence du commandant de la région militaire Nord-Est.
La porte Serpenoise (1851). Sans la muraille dans laquelle elle était engagée, la porte ressemble maintenant à un arc de triomphe, faisant la jonction entre l’ancienne et la Nouvelle Ville (38).
Le monument aux morts (1935), square Galliéni (avenue Joffre). Ce monument aux morts dédié « Aux morts de la guerre » ressemble à une pietà civile (39). Le sculpteur Niclausse a représenté un soldat nu, allongé sur les genoux de sa mère. Il était délicat de mettre un uniforme allemand de Malgré-nous à ce soldat représentant à l’origine les morts français de la Première Guerre mondiale. En 1940, les Allemands ont cassé les bas-reliefs en haut du monument pour honorer leurs victimes. Après la guerre, cette version sobre a fait l’unanimité.
Le nymphée impérial (1904). Sur les ruines de la muraille ouest, a été aménagé un nymphée impérial, appelé aussi Kaiser’s Brunnen (la fontaine de l’empereur), comprenant une façade monumentale, des bassins avec des jets d’eau, des grottes ornées de mascarons, des sculptures de créatures aquatiques sorties de la mythologie germanique ou de l’univers des contes (41). Ainsi un Roi grenouille orne la balustrade du monument. Maurice Barrès s’indigna de la représentation du blason de Metz, entre les pattes d’une grenouille !
Le retour de Metz à la France (1918)
Ce retour s’accompagne de mesures brutales : bannissement des Allemands, mise sous séquestre de leurs biens. C’est un drame pour les Altdeutschen, attachés à la Lorraine qui était devenue leur pays, notamment pour Conrad Wahn, arrivé à Metz en 1872.
Les changements de symboles ne se font pas attendre. Les couronnes impériales, les aigles germaniques sont supprimés et remplacés par des blasons de Metz et des croix de Lorraine. De l’aigle impérial déployé sur le fronton du pavillon d’entrée de la gare, il ne reste que les plumes de la queue (40).
En 1914, lorsque la guerre éclate, il reste de nombreux îlots vides. La Nouvelle Ville est achevée dans l’entre-deux-guerres en respectant le plan initial. C’est chose faite en 1939.
Mais en réaction, une architecture « revancharde » voit le jour : éclectisme de type haussmannien, néoclassicisme, Art nouveau tardif, Art déco.
Conclusion :
L’objectif de germaniser Metz jugée trop française par Guillaume II est atteint.
Le quartier impérial avec ses façades germaniques, les inscriptions allemandes gravées dans la pierre transportent le visiteur outre-Rhin. Mais du côté du Ring, avec la patine du temps, il peut goûter aussi le charme d’une ville à la croisée des cultures.
Chantal Cormont
Bibliographie
Commaille Laurent, Un exemple de villes rattachées : les villes de Lorraine annexée entre 1870 et 1918, Presses universitaires François-Rabelais, 2003. En ligne sur OpenEdition Books
https://books.openedition.org/pufr/3050?lang=fr
Pignon-Feller Christiane, Metz 1900-1939 Un Quartier impérial pour une Nouvelle Ville, Éditions du Patrimoine, collection Les Itinéraires, 2013.
Blog de Pierre Guernier, Mon Grand-Est.
mon-grand-est.fr/quartier-impérial-allemand-de-metz
Plan du Quartier impérial extrait du fascicule de la collection Les Itinéraires sur Metz.